Ce cours propose deux conférences indépendantes : la première sur Rosa Luxemburg et la seconde sur Nancy Fraser.
Plus d’un siècle après son assassinat par des soldats des corps francs (un des ancêtres des milices SA du parti nazi), que peut nous dire Rosa Luxemburg sur notre monde et quelles pistes nous offre-t-elle pour tenter de le transformer? Cette révolutionnaire née dans la zone russe de la Pologne et ayant mené l’essentiel de son travail politique en Allemagne avant et pendant la Première Guerre mondiale aborde des thèmes de réflexion qui ne sont pas tellement éloignés de nos préoccupations actuelles. Si l’on peut remarquer un nouvel intérêt pour sa pensée, c’est précisément parce que, au-delà des années qui nous séparent, celle-ci incarne un marxisme non dogmatique qui nous permet de penser certains enjeux de notre époque et surtout nous fournit des pistes pour aller au-delà du néolibéralisme (et du capitalisme dont il est la forme contemporaine). J’aborderai trois enjeux : politisation et révolution; impérialisme, militarisme et prédation; critique du dogmatisme et de l’autoritarisme.
Nancy Fraser est une professeure étasunienne de philosophie politique, qui a œuvré principalement à la New School for Social Research. Elle s’est principalement intéressée aux questions de justice et d’injustice dans le monde occidental contemporain et s’est faite assez critique à partir des années 1990 des dérives du féminisme libéral qui s’est adapté aux exigences du néolibéralisme. Nancy Fraser a construit sa réflexion en articulant un engagement militant dans le mouvement des droits civiques, contre la guerre au Vietnam, la nouvelle gauche étasunienne des années 1960 et le féminisme et une réflexion théorique largement inspirée de la théorie critique. Elle développe depuis 1980 une réflexion à la fois philosophique et politique sur les grands enjeux qui traversent les sociétés occidentales contemporaines cherchant à articuler redistribution, reconnaissance et participation politique. Sur le plan philosophique, elle situe sa réflexion dans la perspective d’une histoire sociale et politique qu’il s’agit de comprendre pour saisir comment se constituent et s’affrontent les divers enjeux de justice. Son originalité est de proposer un modèle tridimensionnel de la justice sociale qui articule des enjeux de distribution socio-économique, de reconnaissance et de parité de participation et qui prend acte qu’ils sont autant susceptibles de politiques correctrices (sans rupture avec l’ordre social existant que transformatrices. De plus, elle soutient qu’il faut penser la justice de façon multiscalaire (local, national, régional, global).